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Re: Fw:Re:[Fsfe-france] Logiciel Libre et droit de la concurrence


From: Loic Dachary
Subject: Re: Fw:Re:[Fsfe-france] Logiciel Libre et droit de la concurrence
Date: Sun, 1 Jun 2003 15:36:20 +0200

address@hidden writes:
 > C'est l'arrêt qui utilise le terme de propriété
 > intellectuelle. Il visait même la propriété industrielle ET
 > intellectuelle, les propriétés immatérielles en fait. Ce
 > n'est normalement pas un terme vague pour un juriste...

        C'est dommage que tu ne souhaites pas utiliser un autre terme
lorsque c'est possible. Pour ma part j'estime que c'est très
important.

 > Ca n'est pas une condition de l'entente juridiquement
 > parlant mais toutes les ententes sont secrètes et reposent
 > sur des informations que l'on cache au public et aux
 > concurrents qui sont exclus de l'entente.

        Je ne vois toujours pas pourquoi une entente illicite serait
empêchée par le fait de pouvoir regarder les sources d'un logiciel.
Ni même pourquoi une entente dont tous les termes sont publics ne
pourrait pas être illicite. Il n'existe pas de rapport de cette sorte.

 > >    (Un Logiciel Libre n'est en aucun cas en position d'obliger
 > >     qui que ce soit à faire quoi que ce soit. Dans le meilleurs
 > >     des cas (copyleft) il impose une condition à sa >distribution
 > >     et sa modification. Présenter les Logiciel Libre comme tu >le
 > >     fais ici revient à leur attribuer un pouvoir coercitif
 > >qu'ils
 > >     n'ont pas.)
 > 
 > La licence est coercitive... Une fois choisie, elle s'impose
 > à l'auteur comme aux utilisateurs. Je schématise mais il ne
 > faut pas non plus trop détailler non? 

        Le problème n'est pas de schématiser ou de détailler.  Une
licence pose des conditions. Il n'est pas difficile de parler de
conditions au lieu de parler d'obligations sans allonger un texte pour
autant. Le sens associé à "obligation" est très différent du sens
associé à "condition". Le lecteur comprend des choses très différentes
quand il lit "obligation" ou quand il "condition". Or "condition" est
fidèle à la réalité alors que "obligation" ne l'est pas. 

        Voici mes remarques sur le texte
http://soufron.free.fr/files/LLDC.html (aujourd'hui).

----------------------------------------------------------------------
>   Le droit français de la concurrence est actuellement régi par
>   l'ordonnance du 1er décembre 1986 modifiée par la loi du 1er juillet
>   1996 et il repose sur le principe de la liberté de la concurrence[1]1.
>
>   En principe donc, tout ce qui n'est pas interdit est autorisé avec
>   l'espoir que cette liberté permette l'apparition de produits nouveaux,
>   qu'elle favorise l'abaissement des prix et l'amélioration de la
>   qualité.
>
>   Les logiciels libres correspondent pour leur part à des logiciels
>   distribués en même temps sous forme binaire et sous forme de code
>   source par le biais d'une licence qui interdit de rediffuser le
>   logiciel en conserver pour soi les modifications qu'un programmeur y
>   apporterait.

        Il est faux de dire que tous les Logiciels Libres sont copyleft.
Il est faux de dire que je ne peux pas rediffuser un Logiciel Libre
non modifié sans divulguer les modifications que j'y ai apporté. C'est
un grand problème lorsqu'une phrase peut dire des choses fausses. Le
fait qu'elle dise aussi des choses justes ne change rien au problème. Si
je dis "Tous les hommes sont blancs" c'est une affirmation fausse et le
fait qu'il existe des hommes blancs ne la rend pas juste pour autant.

>   Le droit de la concurrence touche aux problèmes de propriété
>   intellectuelle l'arrêt Parke-Davis[2]2 qui énoncait en termes généraux
>   l'applicabilité des règles de concurrence à l'exercice des droits de
>   propriété industrielle et intellectuelle, la solution a ensuite été
>   étendue aux droits d'auteurs depuis l'arrêt Magill rendu par la CJCE
>   en 1995[3]3. Les influences croisées des logiciels libres et du droit
>   de la concurrence sont donc parfaitement susceptibles d'être étudieés
>   et, puisque celui-ci réprime spécifiquement les ententes illicites et
>   les abus de position dominante, le plus simple est sans doute de
>   s'intéresser successivement à ces deux hypothèses.

        Toujours le problème de "propriété intellectuelle" mais je
crois comprendre que tu ne veux pas le corriger.

>   I. Logiciels Libres, ententes et liberté de la concurrence.
>
>   Les ententes entre entreprises sont normalement licites mais
>   l'expérience montre qu'elles peuvent perturber le marché en portant
>   atteinte à la liberté de la concurrence. La forme juridique adoptée
>   par les entreprises qui veulent se concerter est sans influence pour
>   l'application des dispositions prohibant la concurrence. On ne tient
>   compte que de leurs pratiques et des résultats qu'elles ont
>   obtenues[4]4.
>
>   Mais les logiciels libres imposent une facilité d'accès au code source
>   qui empèche structurellement les ententes entre entreprises puisque
>   celles-ci ne sauraient fonctionner sans une nécessaire part de secret.
>   En effet, au-delà des procédés d'ingénierie inverse qui permettent
>   bien sur d'étudier le fonctionnement d'un logiciel, l'accès au code
>   source simplifie cette étude et empêche la concertation de certaines
>   entreprises contre leurs concurrents ou contre le public.

        (cf début du mail)

>   Le droit de la concurrence réprime ainsi les entreprises qui mettent
>   en place des systèmes de quotas de production et de répartition des
>   marchés qui maintiennent une pénurie artificielle. Il est évident
>   qu'aucun dispositif de ce type ne pourrait se mettre en place dans un
>   marché ouvert au logiciel libre puisque toute entreprise intéressée y

        Le marché des machines de découpe de tissu est "ouvert au
Logiciel Libre" mais je ne crois pas que cela ait une influence sur
les quotas/la répartition des machines de découpe de tissu. Il ne faut
probablement pas viser aussi large.

>   est autorisée suppléer à l'offre déficiente. L'idée même de logiciel
>   libre annihile totalement les possibilités d'accords de ce type sur le
>   marché des logiciels.

        Sur le marché des logiciels propriétaires cela reste possible.
A cet égard le marché des Logiciels Libres n'a pas l'influence que tu
lui prête sur le marché des logiciels en général.

>   De la même façon, les ententes en matière de prix pour les maintenir à
>   un niveau élevé (ententes de fournisseurs) ou faible (ententes
>   d'acheteurs) seraient impossible à élaborer puisque, là encore, la
>   libre disponibilité des codes sources des logiciels libres et la
>   possibilité ouverte à tous d'intervenir sur le logiciel empêchent les
>   entreprises de surestimer la valeur de leurs services.

        J'inverserais l'ordre de "codes sources" et "possibilité
d'intervenir" car la "possibilité d'intervenir" est plus
importante. Sans "codes sources", la "possibilité d'intervenir" est
utile. Sans "possibilité d'intervenir" les "codes sources" sont
inutiles. L'un est subordonné à l'autre.

>   En ce qui concerne les pratiques de barrières à l'accès au marché, les
>   boycotts et autres mises à l'index; ces refus collectifs de traiter
>   avec des entreprises pour les évincer du marché ne pourraient pas non
>   plus avoir cours à propos de logiciels libres puisque la licence même
>   utilisée pour les diffuser empêche clairement de refuser l'accès au
>   code source à un tiers.

        Ce n'est pas l'accès au code source qui est important ici. Si
un logiciel propriétaire était distribué sous une licence permettant
de consulter le code source mais interdisant toute modification,
redistribution des binaires ou même exécution des binaires, il
permettrait de de poser des barrières à l'accès au marché. Le fait que
le Logiciel Libre ne permette pas d'imposer des barrière vient des
libertés d'exécution, d'étude, de distribution et de
modification. L'accès au code source aide à jouir des libertés d'étude
et de moficiation. L'accès au code source est un accessoire, ce n'est
pas la racine des propriétés du Logiciel Libre.

>   II. Logiciel Libre, abus de position dominante et équilibre de la
>   concurrence.
>
>   La liberté de la concurrence n'est pas totale et le droit de la
>   concurrence veille à ce que les plus forts ne puissent pas éliminer
>   définitivement les plus faibles en toutes circonstances. Le principe
>   qui sous-tend le droit des abus de position dominante serait qu'une
>   économie prospère suppose à la fois de grosses et de petites
>   entreprises. On voit déjà que les logiciels libres s'inscrivent
>   particulièrement dans cet objectif puisqu'ils permettent aux
>   entreprises plus importantes de transmettre le code source des
>   applications qu'elles développent ou utilisent à leurs collègues plus
>   modestes .

        La transmission du code source est l'aspect le moins important
des Logiciel Libre. Le mentionner comme étant la raison essentielle
pour laquelle le Logiciel Libre s'inscrit dans l'objectif de
co-existence de petites et grosses entreprises n'est pas une bonne
idée. Pourquoi tant d'insistance à doter la forme source d'un
programme de vertues intrinsèques qu'elle n'a pas ?

>   Les abus de position dominante sont réprimés selon les mêmes modalités
>   que les ententes[5]5 et ils sont définis comme les activités d'une
>   entreprise ou d'un groupe d'entreprises occupant sur le marché une
>   situation de monopole ou disposant d'une puissance économique
>   manifeste lorsque ces activités entravent le fonctionnement normal du
>   marché.
>
>   La notion même de position dominante correspond au fait de pouvoir
>   s'abstraire des contraintes du marché en fournissant des produits qui
>   ne sont pas substituables pour le public. Plus particulièrement, la
>   position dominante peut parfaitement résulter d'une disposition légale
>   conférant un monopole ou un quasi-monopole à une entreprise comme
>   c'est bien le cas en matière informatique où les éditeurs de logiciels
>   bénéficient du monopole de l'exploitation de leurs logiciels.
>
>   La notion d'abus traduit l'idée que certaines pratiques qui sont
>   autorisées à de petites entreprises devraient être interdites à des
>   entreprises en situation de position dominante. Le problème est de
>   déterminer quand la pratique devient abusive parce qu'émanant d'une
>   entreprise qui domine le marché. On adopte donc un critère finaliste
>   en considérant que des hausses de prix ou une diminution de la qualité
>   d'un produit est susceptible de traduire la constitution d'un abus de
>   position dominante.
>
>   L'abus de position dominante est donc étroitement lié à l'idée qu'un
>   monopole acquis ou un monopole légal peuvent permettre de contrôler
>   ses clients sur un marché pour leur imposer des conditions
>   déraisonnables. Mais les logiciels libres permettent de contourner ces
>   problèmes de constitution de monopole et de rendre caducs leurs effets
>   en permettant la diffusion du code source de sorte que celui-ci ne

        Pourquoi ne pas simplement dire "la libre diffusion du logiciel" ?
Pourquoi se limiter à la forme source ?

>   permet plus de tenir ses clients en situation de dépendance par
>   rapport à un produit non-substituable à leurs yeux[6]6. Bien plus, le
>   logiciel libre supprime la pertinence de la notion de produit
>   non-substituable puisque la dispoinibilité du code source à tous aux

        Il est plus important ici de parler des libertés de modification
et de redistribution car sans elles, la disponibilité du code source
seraient inutiles. 

>   mêmes conditions facilite l'interopérabilité et autorise l'évolution
>   des solutions logicielles ad vitam aeternam. Comme pour les ententes,
>   le logiciel rend les abus de position dominante structurellement
>   impossibles.

        La phrase est incorrecte, tu as du oublier quelque chose. Par
ailleurs je ne vois pas en quoi les Logiciels Libres pourraient
emp^cher un abus de position dominante. Ils n'aident pas, ne peuvent
pas servir d'instrument à cette fin, mais n'empêchent pas pour autant.

>   Le droit de la concurrence est aujourd'hui un droit en spectaculaire
>   progression aussi bien parce que l'économie française cherche à
>   bénéficier d'un marché efficace que parce que les entreprises
>   françaises souffrent d'un manque d'équité dans leurs relations. La
>   structure actuelle de la propriété intellectuelle accorde aux auteurs
>   un monopole sur l'exploitation de leurs oeuvres. Le droit de la
>   propriété intellectuelle doit désormais s'incliner face au droit de la
>   concurrence. En offrant un pouvoir aux auteurs sur leur public, il
>   crée obligatoirement un contexte propice aux développement de
>   pratiques anticoncurrentielles auxquelles les logiciels libres sont en
>   réalité un remêde souverain.

        C'est toujours trop lyrique à mon goût et pas seulement à
cause du choix des mots. 

>   [7]1Qui ne figure pourtant pas dans le corps de l'ordonnance de 1986
>
>   [8]2 29 février 1968, aff. 24/67, Rec. 82 : " Les droits accordés par
>   un Etat membre au titulaire d'un brevet d'invention ne sont pas
>   affectés dans leur existence par les interdictions des articles 85 et
>   86 du traité ; l'exercice de ces droits ne saurait lui-même relever ni
>   de l'article 85 en l'absence de toute entente, ni de l'article 86 en
>   l'absence d'abus de position dominante ".
>
>   [9]36 avril 1995, RIDA 1995, n°165, p.173 : L'arrêt concernait une
>   chaine de télévision irlandaise qui refusait de communiquer ses
>   programmes aux magazines tv pour favoriser la vente de son propre
>   magazine tv. La CJCE a déclaré que la titularité d'un droit de
>   propriété intellectuelle ne confère pas nécessairement une position
>   dominante soulignant ainsi que ce pouvait cependant être le cas dans
>   certaines circonstances. En l'espèce pourtant, le refus d'accorder
>   l'accès à l'information protégée par des copyrights en ce qui concerne
>   les programmes de télévision était un abus, étant donné que cette
>   information était une donnée indispensable afin de permettre à une
>   société de soutenir la concurrence sur le marché des magazines de
>   télévision.
>
>   [10]4Article 7 de l'ordonnance de 1986.
>
>   [11]5Article 8-1 de l'ordonnance de 1986.
>
>   [12]6Il suffit de reprendre l'exemple des formats de fichiers
>   non-libres qui permettent à Microsoft d'imposer des changements de
>   versions à ses utilisateurs quand ils sortent une nouvelle version.
>   Chaque fois qu'un utilisateur B achète un nouveau logiciel
>   propriétaire, les utilisateurs A qui l'avaient acheté au préalable
>   sont obligés de mettre leur logiciel à jour pour pouvoir continuer à
>   échanger leurs fichiers avec B.
>




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