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Re: [Fsfe-france] Le retour du 13eme bit...


From: Benoît Sibaud
Subject: Re: [Fsfe-france] Le retour du 13eme bit...
Date: Thu, 11 Nov 2004 11:51:44 +0100

> Désolé, mais je prédis un grand avenir au vote électronique. Ce n'est 
> certainement pas un gadget. En facilitant la tenue d'un scrutin, il 
> ouvre de nouvelles voies de prises de décisions collectives, tant au 
> niveau des états qu'au niveau des communautés.

La question n'est pas de savoir si le vote électronique a de l'avenir ou
pas, mais de savoir s'il est juste/honnête/fiable ou pas... Avec du
marketing, on peut idéaliser beaucoup de choses.

« 2004 Election Weirdness Continues »
http://politics.slashdot.org/politics/04/11/08/1910250.shtml?tid=103&tid=219
Votes perdus, comptage à rebours, décomptes faux, etc.

> Par exemple, le vote manuel ne garantit pas qu'il n'y a pas de fraude, 
> ni d'"erreur" de comptage. Je trouve ta confiance dans le système manuel 
> tout a fait naïve. Bien sur le clientélisme n'existe pas en France 
> (lol), ni les pressions, ni la fraude, d'ailleurs l'actualité récente le 
> prouve ;-)... La fraude électorale atteint des niveaux intolérables dès 
> lors que la démocratie ne fonctionne pas correctement. Sinon, tout va 
> bien, manuel ou électronique.

Les fraudes actuelles concernent (à ma connaissance, donc de manière non
exhaustive) :
- les listes électorales (faux électeurs à Paris, électeurs morts en Corse,
etc.) : le vote électronique ne change rien à ce niveau, le contrôle de
l'identité des électeurs se fait toujours à la main, et l'établissement des
listes ne dépend pas du mode de scrutin. Illustration : aux États-Unis
(vote électronique, mécanique et papier), l'identité des électeurs n'est
pas vérifiée, et on peut facilement s'inscrire dans plusieurs bureaux, y
compris sous des fausses identités.
- l'achat réel ou supposé de voix, la corruption, etc. (Polynésie,
élections américaines, etc.) : le vote électronique ne change rien à ce
point.
- les manipulations des décomptes par bureau au niveaux hiéarchiques
supérieurs (ville, département, région, état, etc.) : les différents
scrutateurs peuvent transmettre leurs propres décomptes et effectuer un
recomptage séparé. Avec le vote électronique, on pourrait envoyer
directement tous les votes au niveau national et empêcher tout recomptage.
Si le décompte continue à se faire au niveau du bureau, le mode de scrutin
ne change rien à la possibilité de frauder. Par contre l'envoi informatique
est plus facilement pertubable.
- un petit malin dans un bureau, un expert qui réussi à tripatouiller
localement le vote : un Gérard Majax-like qui glisse 12 bulletins dans
l'urne, prenons même un David Coperfield-like qui remplace une urne par une
autre sans que personne ne voit rien, ou un chimiste qui produit des
bulletins avec de l'encre qui s'efface pour rabaisser un candidat, ou ...
Avec le vote papier, il faut un expert par bureau pour tricher, la fraude
est locale. Avec le vote électronique, un expert (spécialiste en sécurité
informatique, Majax-like ou autre) peut toujours truquer le vote local.
Sauf qu'en plus, l'expert en sécurité peut attaquer toutes les autres urnes
si elles sont en réseau.
- le matériel fourni : l'administration ou l'entreprise qui fournit le
matériel (urnes, bulletins, etc.) peut truquer l'urne (urne transparente à
double fond ?!) ou les bulletins (imaginons des bulletins qui se dissolvent
après quelques minutes au contact de l'enveloppe ?!). C'est relativement
difficile à réaliser tout de même, et il n'est pas sûr que tout le matériel
provienne du même endroit. Avec le vote électronique, une entreprise
fournit des urnes électroniques non vérifiables, et peut donc décider du
résultat « facilement ». Et si l'entreprise qui fournit le matériel ne
tente pas sa chance, le gouvernement/la majorité en place peut décider elle
de le faire.

Autre point : en plus de toutes les vérifications/contrôles possibles au
fur et à mesure avec le vote papier, les sondages aléatoires en sortie
d'urne permettent une vérification supplémentaire. Qui est la seule
possible avec le vote électronique. Et qui est impossible avec le vote par
Internet.

> A te lire, une liste d'électeurs manuellement tenue sur un registre est 
> plus fiable qu'un fichier informatique recoupé ?

Sauf que vote électronique, vote par Internet ou vote papier, c'est la même
liste d'électeurs qui est utilisée.

> Pour qu'un vote soit reconnu comme valable, il n'est pas nécessaire que 
> les résultats soient exactement le reflet des votes exprimés. Les 
> critères de validation font l'objet de la loi et c'est pour ça que les 
> invalidations d'élus sont rares.

J'aime bien cet argument. On me l'a sorti à propos des États-Unis
(précision : je me fiche ici du résultat des élections américaines, mon
souci est sur le vote électronique en général, pas sur le nom du président
américain), en me disant que comme le vainqueur avait 4 millions de voix
d'avance, ce n'était pas la peine de se préoccuper des fraudes. Le souci
ici c'est : 1) que le décompte n'est toujours pas fini, 2) que le décompte
est faux et que je doute que quelqu'un sache de combien (ou alors on
connait les bogues des urnes électroniques et les votes non pris en compte
?!). C'est difficile de se baser sur un décompte faux pour justifier un
décompte faux. Sans compte que ce n'est pas 4 millions de voix qu'il faut
battre dans leur système, c'est gagner État par État, et là les écarts sont
en centaines de milliers de voix, de l'ordre des erreurs de comptage donc.

Si on sait que le décompte est faux de 1% et que l'écart entre candidats
est de 3%, le décompte faux ne change pas l'issue du résultat (c'est juste
un peu honteux 1% d'erreur pour une démocratie mais bon...). Par exemple on
peut imaginer une mairie qui brûle et donc des votes non décomptés, mais
qui n'influeront pas le résultat du scrutin.

Avec le vote électronique, le décompte est faux de X% (X pouvant être
largement supérieur à 100, exemple de l'Ohio avec un candidat à 4.258 voix
sur 638 votants), et généralement non vérifiable. On laisserait alors les
pleins pouvoirs à une autorité suprême (Cour suprême aux États-Unis par
exemple) pour décider qui est le gagnant, si le vote est confirmé ou pas,
sans contrôle ?

Par ailleurs, le vote électronique peut être intéressant pour des scrutins
avec peu d'enjeux. L'APRIL l'utilise pour demander l'avis de ses adhérents
sur divers sujets par exemple. Mais je ne lui confierai pas des élections
importantes pour la démocratie, et je suis conscient de ses limites et
dangers. Par exemple le gouvernement suggère de commencer par les élections
d'entreprises, les prudhommes, etc. pour tester le vote électronique en
France. Scrutins avec de faibles enjeux. Comme le conseil d'administration
de Vivendi ? (intrusion dans le système de vote en sans-fil lors du conseil
d'administration de Vivendi
http://www.latribune.fr/Dossiers/vivendi.nsf/0/C1256B2E0034D352C1256BAA007773BA?OpenDocument
)

-- 
Benoît Sibaud




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