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Re: [Fsfe-france] Quelles responsabilité s pour l'auteur d'un logiciel


From: Raphael Rousseau
Subject: Re: [Fsfe-france] Quelles responsabilité s pour l'auteur d'un logiciel sous GNU GPL ?
Date: Wed, 12 Feb 2003 22:55:38 +0100
User-agent: Mutt/1.3.28i

On Wed, Feb 12, 2003 at 06:08:35PM +0100, romain.boucq wrote:
> Discussion sur news:fr.misc.droit.internet à propos de la responsabilité
> contractuelle dans le cadre de la GNU GPL.
> 
> > A ce jour, quelles sont les responsabilités d'un "éditeur"
> | > d'un logiciel sous le régime de la GNU GPL ?
> |
> | Il n'y a aucune responsabilité contractuelle en vertu de la GPL.
> 
> >Cela semble contradictoire avec les propos
> >de Maitre Valérie Sédallian dans cet article:
> >http://solutions.journaldunet.com/0211/021128_juridique.shtml
> >où, vers la fin, elle avance:
> >
> > Les cas dans lesquels les clauses limitatives ou
> > exclusives de responsabilité peuvent être écartées
> > sont les suivants :
> >
> > - en cas de faute lourde ou de dol (tromperie) de
> >  la partie qui invoque le bénéfice de la clause ;
> 
> Il ne peut pas y avoir de faute lourde, ni de dol de la part de l'auteur
> d'un logiciel sous GPL. Il ne s'engage pas à ce que le licencié puisse
> utiliser le logiciel, mais puisse le copier, le modifier et le redistribuer
> librement. Il s'agit d'une situation juridique créée par le contrat, de
> manière automatique, sans qu'aucun comportement particulier ne soit exigé
> par l'auteur, c'est-à-dire sans obligation juridique.
> 
> La faute lourde est une qualification juridique résultant de l'attitude
> d'une personne qui, par son comportement, ne respecte pas ses engagements
> contractuels et auquel on ne peut trouver aucune justification. Cela suppose
> un non-respect des engagements contractuels, ce qui est impossible puisque
> l'auteur n'a rien à faire pour que le contrat produise cette situation
> juridique.
> 
> Le dol suppose une mauvaise foi dans l'exécution du contrat de la part de
> l'auteur. Or, dans le cas de l'exploitation d'un logiciel libre, il sera
> difficilement considéré de mauvaise foi car il "abandonne" ses droits sur le
> logiciel au profit de l'utilisateur, de manière vraisemblablement gratuite.

Je n'ai jamais rien entendu de tel. Le logiciel libre se base justement
sur la notion de copyleft : l'auteur profite de sa propriété
intellectuelle sur le dit logiciel afin d'exercer ses droits de manière
particulière ; il donne les 4 libertés à quiconque.
Télécharger un logiciel ne vous en rend pas propriétaire, cela vous met
dans une situation de respect de la licence d'exploitation du logiciel.
Dans le cas du logiciel libre sous GNU GPL, vous êtes tenus d'en
respecter les termes. Non ?
Vous voulez dire qu'il abandonne des droits que l'on est habitué à voir
chèrement défénedus ? Certes !


> Sa mauvaise foi supposerait qu'il réalise une action en contrefaçon contre
> un licencié, ce qui serait sans effet à cause de la GNU GPL et rendrait
> inopposable son action - c'est-à-dire sans effet.
> 
> > - en cas de manquement à une obligation essentielle
> >  du contrat qui a pour effet de contredire la portée
> >  de l'engagement pris (Jurisprudence dite "Chronopost",
> >  Cour de Cassation 22 octobre 1996) ;
> 
> Les "obligations" de l'auteur sont de permettre à toute personne, ayant
> accepté la licence, de pouvoir copier, modifier et redistribuer le logiciel
> ou celui-ci modifié. Il s'agit d'un effet légal automatique du contrat. De
> ce fait, l'auteur ne peut pas, même s'il le voulait, réaliser un manquement
> à une obligation essentielle de son contrat. Si cette jurisprudence y est
> effectivement applicable, elle n'a aucune portée pratique et revient à
> valider la clause élusive de responsabilité. Même si le logiciel ne
> fonctionne pas, l'auteur ne peut être tenu responsable puisqu'il s'est
> simplement engagé à vous permettre de le copier, le modifier (ce qui
> comprend "le corriger") et à le redistribuer. Il est toujours possible de
> copier, modifier et redistribuer un logiciel qui ne fonctionne pas, même si
> cela paraît n'avoir que peu d'intérêt pratique.
> 
> > - lorsque le logiciel est fourni à un consommateur,
> >  en application du régime des clauses abusives (article
> >  L 132-1 du Code de la consommation) ;
> 
> Dans les rapports professionnels et non-professionnel et consommateur, les
> clauses abusives sont celles "qui ont pour objet ou pour effet de créer, au
> détriment du non-professionnel ou consommateur, un déséquilibre significatif
> entre les droits et obligations des parties au contrat."(L.132-1 code de a
> consommation)
> 
> Dans le cas d'un logiciel libre, il n'est pas possible d'appliquer, me
> semble-t-il, la législation du droit de la consommation, car il n'existe pas
> de déséquilibre significatif entre le professionnel et le consommateur.

Le droit de la consommation$ ne s'applique-t-il _vraiment_ que lorsqu'un
tel déséquilibre existe ?
La notion de «professionnel» est aussi sujette à caution, non ?
Je suis un professionnel de l'informatique, donc je ne peux plus, à
partir de maintenant, faire un logiciel déféctueux ?
Dans l'affirmative, tout concepteur de logiciels devrait se méfier... y
compris les grands éditeur !


> L'auteur réalisant un transfert de droit au profit du licencié, en dehors de
> tout cadre commercial et sans contrepartie, il n'existe donc pas de
> consommateur ou de non-professionnel au sens où l'entend le droit de la
> consommation.

L'auteur ne réalise pas un "transfert de droits", il exerce ses droits
en vous laissant une marge de manoeuvre énorme sur l'oeuvre en question.
Tout utilisateur ne peut pas ajouter son copyright dès qu'il a lancé
votre application (heureusement). 

D'après votre affirmation ci-dessus, le logiciel libre fait donc bien
disparaître les notions de producteur et de consommateur ? On est bien
alors face à un «objet juridique non identifié» ? ;-)
Il y a bien des consommateurs et des producteurs, mais identifier les
uns et les autres est très difficile.


> Si l'auteur décide de faire payer le logiciel, il me semble
> qu'il n'existe toujours pas de déséquilibre significatif au profit de
> l'auteur puisque, par rapport à la pratique contractuelle des licences
> informatiques standards, le contrat est effectivement déséquilibré, mais au
> profit du licencié.
> 
> > - en application du régime de la responsabilité du fait
> >  des produits défectueux qui prévoit le principe d'un
> >  régime de responsabilité sans faute des fabricants et
> >  distributeurs (articles 13686-1 à 1386-18 du Code civil).
> >  L'application de ce texte aux logiciels ne vise que les
> >  situations où ceux-ci seraient à l'origine directe d'une
> >  atteinte à la sécurité physique des personnes ou des biens.
> 
> L'auteur d'un logiciel ne peut être considéré comme un producteur au sens de
> l'article 1386-6 du Code civil, que s'il agit à titre professionnel. Entre
> professionnels, la clause élusive de responsabilité est valable (article
> 1386-15 du Code civil).
> 
> Ainsi, il ne reste que la possibilité de la relation professionnel -
> consommateur où cette responsabilité pourrait être recherchée. Cette
> relation suppose un dommage, pour le champ d'application de la
> responsabilité du fait des produits défectueux, à une personne humaine ou à
> un bien autre que le produit défectueux lui-même.
> Dans le cadre d'un logiciel, cela suppose qu'il provoque l'explosion
> de l'ordinateur, ce qui me semble impossible, ou des dégâts à
> l'ordinateur suffisamment important pour que celui soit "cassé".
> D'après mes connaissances informatiques, les possibilités me semblent
> particulièrement réduites.

Les programmes informatiques sont aujourd'hui tellement implantés
partout dans notre vie qu'il ne faut même pas aller jusqu'à l'explosion
d'un ordinateur pour que les dégats soient considérables.
Imaginons que l'ordinateur contrôlant la navigation de l'avion dans
lequel vous voyagez plante, style écran bleu. Pas une seule odeur
nauséabonde de brûlé, mais vous n'avez que peu de chances de survie...
Et si votre compte bancaire venait à devenir négatif ? Passer de 1000
Euros en positif à 1000 Euros en négatif est une opération qualifiée
d'élémentaire sur la plupart des plates-formes informatiques...


> Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'il faut encore qualifier l'auteur de
> professionnel au sens du droit de la consommation, ce qui suppose, me
> semble-t-il, une activié commerciale et un comportement commercial vis-à-vis
> du licencié. Si on prend l'hyptothèse d'une distribution GNU/Linux,
> n'oublions que la GPL prévoit que le contrat est passé entre l'auteur
> lui-même et le licencié. Ainsi, le licencié qui distribue des logiciels
> n'est pas impliqué dans la relation. Connaissez-vous beaucoup d'auteur de
> logiciel libre - sous GNU GPL - ayant un comportement commercial (attitude
> spéculative et régulière) vis-à-vis de leur licencié ?

Oui, toutes les sociétés qui font du service autour du logiciel libre.
Cela concerne non seulement toutes celles qui ont bâti leur activité sur
ce modèle, mais également de plus en plus de sociétés de services
«classiques».

 
> Enfin, il faut également considérer que le logiciel est un produit au sens
> de l'article 1386-3 du Code civil ce qui ne me semble pas évident  puisqu'
> "est produit tout bien meuble, même s'il est incorporé dans un immeuble, y
> compris les produits du sol, de l'élevage, de la chasse et de la pêche.
> L'électricité est considérée comme un produit."(article 1386-3 du Code
> civil ). Cette définition laisse supposer qu'il s'agit plutôt des biens
> corporels qui sont visés ( ce qui justifie la précision pour l'électricité).
> Néanmoins, attendons une décision d'un juge sur les logiciels pour le
> savoir, sachant les conditions que doivent remplir un dommage pour être dans
> le champ d'application de la loi, on peut vraisemblablement attendre
> longtemps.
> 
> >
> > Ces limitations à la validité des clauses exclusives de
> > responsabilité sont applicables à un logiciel fournit
> > sous licence GPL, comme à un logiciel propriétaire.
> > ***</citation>***
> >
> > Qu'en pensez-vous?
> >
> 
> Donc, cette clause me semble parfaitement valable à la fois juridiquement et
> également car la plupart des limitations exposées par Maitre Valérie
> Sédallian n'a de possibilité pratique de se réaliser. En ce qui concerne les
> logiciels propriétaires, comme il s'agit d'un droit d'utilisation qui est
> concédé, dès lors la plupart des exceptions que Maitre Valérie Sédallian
> cite ci-dessus me semblent valables et applicables.

Merci d'avoir pris le temps de lire ma prose ;-)
Désolé de n'avoir pas ôté le contenu sur lequel je n'intervenais pas,
mais c'est pour des questions de contexte. Cela explique que ce mail
soit si long.


        Raphaël
-- 
Raphaël Rousseau
Stat rosa pristina nomine, nomina nuda tenemus.




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