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Re: audio fingerprinting


From: Valentin Villenave
Subject: Re: audio fingerprinting
Date: Mon, 1 Apr 2019 17:15:51 +0200

On 4/1/19, sur free <address@hidden> wrote:
> BMAT vient de déposer un brevet pour associer l'empreinte musicale à
> toutes les musiques qu'ils capturent. Cette innovation de BMATme semble
> intéressante à suivre pour les experts de la musique notée (le timbre!)

"Lointain du monde de LilyPond"… Certes, et probablement à plus d’un titre.

Tout d’abord parce que, effectivement, LilyPond se concentre avant
tout sur des représentations de la musique sous une forme de plus haut
niveau (la partition en PostScript ou SVG, le code, les music streams
ou les projets tels que l’export en XML ou en Braille) ; même le MIDI
n’est pas un format sonore mais un simple schéma d’événements pouvant
ensuite être interprété au moyen de différentes fontes sonores.
(LilyPond inclut tout au plus quelques fonctions spécifiquement
destinées à l’interprétation, telles que articulate.ly ou tout
dernièrement swing.ly.) Donc les questions de "timbre" ou de
"signature sonore" sont plutôt liées aux choix de fontes sonores qu’à
la partie gérée directement par LilyPond même.

Ensuite d’un point de vue différent, toutes ces technologies que l’on
trouve dans les produits de Bmat, de Shazam, de Google (recherche
audio et robots Content-ID) ou dans plusieurs produits de l’Ircam,
brillent en général par leur orientation industrielle et propriétaire
; le brevet de Bmat en témoigne mais ce n’est qu’un exemple. (On peut
d’ailleurs s’interroger sur la légitimité qu’il y a à utiliser des
structures de recherche publique comme tremplin pour ensuite créer des
startups et multiplier les dépôts de brevets -- mais c’est un autre
problème.) En tout cas, GNU LilyPond se situe dans une démarche
diamétralement opposée, qui est celle du logiciel Libre et du partage
du patrimoine immatériel (c’est la raison pour laquelle LilyPond est
volontiers utilisé par des sites comme mutopiaproject, IMSLP,
Wikipédia etc.).

De surcroît -- et là je parle plutôt d’un point de vue personnel (que
j’ai développé dans plusieurs articles) -- le fait de se concentrer
sur la musique en tant qu’objet sonore revient souvent à ignorer la
pensée musicale dans sa dimension abstraite, et à substituer au rôle
du compositeur celui de l’interprète (et, plus encore, de l’ingénieur
son). C’est ainsi qu’un de mes amis clavecinistes se retrouve
régulièrement censuré par YouTube parce que les enregistrements qu’il
met en ligne, de partitions datant de plusieurs siècles, «sonnent»
suspicieusement comme certains disques appartenant à tel ou tel groupe
industriel. De ce point de vue-là, LilyPond s’inscrit au contraire
dans une démarche de réhabilitation de la partition en tant qu’objet
graphique soigné, en tant qu’objet conceptuel (le code en témoigne) et
en tant que support vivant destiné à être lu et interprété par tout un
chacun à sa propre façon.

Ce qui n’empêche pas qu’on puisse s’intéresser à la fois à LilyPond et
au traitement de signal sonore ; l’un des contributeurs historiques de
LilyPond, Graham Percival, s’est ainsi longuement penché sur Marsyas,
qui est un logiciel Libre proposant une représentation analytique de
la musique sonore : https://github.com/marsyas/marsyas
Au passage, plus l’on assistera à des dépôts de brevets sur toutes les
méthodes (triviales ou non) de traitement automatisé, plus l’existence
de tels projets Libres sera menacée.

Cordialement,
V. Villenave.



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